dimanche 16 février 2014

La Horde du Contrevent, d'Alain Damasio #2

Titre : La Horde du Contrevent
Auteur : Alain Damasio
Editeur : Folio SF

Date présente édition : 2012 (1ère éd. La Volte, 2004)
Couverture :
Illustrateur : Boris Joly-Erard
Pages : 701 pages
Prix : 10,60 euros

Biographie auteur :

Alain Damasio, né Alain Raymond, est un écrivain français de science-fiction. Il choisit ce patronyme en l'honneur de sa grand-mère Andrée Damasio.
Sorti de l'ESSEC en 1991, il choisit de s'isoler (d'abord dans le Vercors puis à Nonza, en Corse) pour s'adonner à l'écriture. Son domaine de prédilection est l'anticipation politique. Il marie ce genre à des éléments de science-fiction et/ou de fantasy.
Jeune, il écrit de nombreuses nouvelles. Son premier texte long est La Zone du dehors, roman d’anticipation qui s’intéresse aux sociétés de contrôle sous le modèle démocratique (inspiré des travaux de Michel Foucault et Gilles Deleuze). Son second livre est récompensé par le Grand Prix de l'Imaginaire 2006 dans la catégorie Roman. Il s'agit de La Horde du Contrevent (roman accompagné d'une BOL - Bande Originale de Livre -).

Synopsis :

Un groupe d'élite, formé dès l'enfance à faire face, part des confins d'une terre féroce, saignée de rafales, pour aller chercher l'origine du vent.
Ils sont vingt-trois, un bloc, un nœud de courage : la Horde. Ils sont pilier, ailier, traceur, aéromaître et géomaître, feuleuse et sourcière, troubadour et scribe. Ils traversent leur monde debout, à pied, en quête d'un Extrême-Amont qui fuit devant eux comme un horizon fou.
Expérience de lecture unique, La Horde du Contrevent est un livre-univers qui fond d'un même feu l'aventure et la poésie des parcours, le combat nu et la quête d'un sens profond du vivant qui unirait le mouvement et le lien. Chaque mot résonne, claque, fuse : Alain Damasio joue de sa plume comme d'un pinceau, d'une caméra ou d'une arme…
Chef-d'œuvre porté par un bouche-à-oreille rare, le roman a été logiquement récompensé par le Grand Prix de l'Imaginaire.

Critique :

                Il est des livres dont on ne sort pas indemne. Indéniablement, La Horde du Contrevent appartient à cette catégorie. Et c’est bien pour cela que chez le Dévoreur de livres, on en refait une seconde chronique, après la première très élogieuse d’Eäron Valil. Je profitais de la lecture commune sur le Cercle d’Atuan pour lire enfin ce bijou de fantasy. Et je vais être extrêmement élogieux.

                La Horde du Contrevent est un chef-d’œuvre. Tout d’abord, un chef-d’œuvre de travail. Alain Damasio nous offre un livre-univers extrêmement riche en décors et personnages, chaque chose plus intéressante que l’autre. Peut-être entrerez-vous plus ou moins rapidement dans cette fresque proposée par l’auteur tellement elle parait originale pour une fantasy parfois très typée elfes-nains-bidules-machins-chouettes, mais une fois happé, impossible de lâcher prise. Entre les membres de la horde, les voyageurs fréoles en chars à voiles ou encore la société d’Alticcio, pas moyen de décrocher. Ou lorsque les hordiers traversent seules les épreuves du contre (avance contre le vent) dans des milieux particulièrement inhospitaliers, où nos héros vont se découvrir et redécouvrir encore malgré les dizaines d’années communes.

                Je suis embêté car je parviens difficilement à vous faire part de la claque reçue. Rarement ai-je autant cogité lors d’une lecture. Tout dans ce qu’écrit Damasio a un sens. On parle souvent d’une SF intelligente, utilisons le terme de fantasy intelligente dans ce cas. D’ailleurs, je donne mon petit avis sur ce débat dont je n’avais pas connaissance avant hier. La Horde du Contrevent, SF ou fantasy ? Dans mon esprit, il me semblait naturel d’assimiler ce roman à de la fantasy, malgré l’étiquette Folio SF (d’ailleurs tout simplement parce qu’il n’y a pas de collection propre à la fantasy chez Folio). Je résume mon point de vue en trois termes : manque de plausibilité de l’univers, quête, technologie archaïque. Mais je reviens outre cet aparté, rarement ai-je été retourné comme une crêpe de cette façon par un auteur. C’est une lecture qui quémande parfois une certaine force d’abstraction devant un sentiment d’incompréhension, et puis pouf ! en dix lignes, on vient de se prendre une enclume sur le coin de la figure. Damasio mène sa barque d’une façon admirable.

                La force de l’intrigue réside dans la restitution de cette quête, qui paraît simpliste au premier abord, on contre le vent qui souffle toujours dans le même sens jusqu’à l’Extrême-Amont, mais qui va lier au fur et à mesure  du récit le métaphysique au physique. Le mystère reste entier jusqu’au bout grâce à cette approche un peu à la One Piece pour les amateurs, si je peux me permettre la comparaison. C’est très linéaire, et en même temps, rien ou presque n’est prévisible. L’intérêt reste entier jusqu’au bout du bout, que ce soit avec la question de l’Extrême-Amont ou celle des neuf formes de vent.

                Impossible aussi de ne pas s’arrêter sur le style d’Alain Damasio, excellemment travaillé. Et il avait intérêt avec la difficulté dans laquelle il se mettait, lui et ses vingt-deux hordiers. Autant dire qu’il maitrise plutôt très bien cette polyphonie, avec des tons différents et cohérents d’un personnage à l’autre, ce qui les rend d’autant plus intéressants et attachants. On est de plein pied dans la psychologie communautaire, et j’adore, surtout avec ce brio littéraire. Entre des descriptions ahurissantes de force visuelle malgré l’emploi d’un paquet de néologismes propre à cet univers ; et entre un héros comme Caracole à la verve incroyable comme en témoigne l’épisode d’Alticcio, La Horde du Contrevent s’affirme comme un chef-d’œuvre sur à peu près tous les plans.

Note : 9,5/10
Une quête entre poésie et aventure, pleine d’intelligence, d’une force visuelle peu commune, un peu dure parfois mais émouvante, la Horde du Contrevent est un chef d’œuvre. A dévorer absolument.

12 commentaires:

  1. C'est un inclassable :D Belle chronique ^^

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    1. Merci, j'ai un peu galéré à la rédiger, mais j'en suis plutôt content aussi :p

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  2. Chef d'oeuvre pour moi aussi !
    J'ai encore plein de moments marquants en tête. Et le style est en belle adéquation avec l'histoire et ce monde étrange entièrement basé sur le vent (jusqu'à sa cosmogonie). Vraiment superbe.

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  3. Comment ne pas être d'accord ?
    Du niveau de "Des fleurs pour Algernon" pour l'intelligence, la claque et l'unanimité qu'apporte ce livre ^^

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  4. +1
    (oui c'est dur aussi d'écrire des commentaires aux chroniques de la Horde :D)

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  5. Quelle chronique ! J’ai prévu de le lire cette année...

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    1. Merci, je t'y encourage vivement, je regrette presque de ne pas l'avoir lu plus tôt, j'aurais pu prosélyter plus en amont :p

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  6. Sacrément bien vendu ! Il va falloir que je le lise ce livre qui ne récolte que des éloges.
    Très belle chronique !

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    1. Merci, ça fait toujours plaisir à entendre, surtout lorsqu'on galère à écrire la-dites chronique ^^'
      Tu n'as, plus qu'à foncer :)

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  7. Très bel avis sur cet incontournable. :-)

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  8. C'est vrai que c'est une grande claque. Comme toi, ce livre m'a fait réfléchir et je ne suis pas sûre d'avoir tout compris non plus. Le style de Damasio m'a époustouflée !

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