dimanche 4 août 2013

Même pas Mort, de Jean-Philippe Jaworski

Titre : Même pas Mort
Série : Rois du Monde – Première Branche
Auteur : Jean-Philippe Jaworski
Editeur : Les Moutons électriques
Date de publication : 2013
Couverture :
Nombre de tomes sorti : Epreuve non corrigée
Illustrateur : Sébastien Hayez
Pages : 270 pages
Prix : 23,00 euros

Biographie auteur :

Jean-Philippe Jaworski a suivi des études de lettres et enseigne le français en lycée, dans la région de Nancy. Il a collaboré au magazine Casus Belli, créé Tiers Âge, un jeu de rôle gratuit sur la Terre du Milieu, et Te Deum pour un massacre, un jeu de rôle historique sur les guerres de religion. Après Janua Vera, son premier recueil de fictions, et Gagner la guerre, son premier roman très remarqué, il nous plonge cette fois dans une trilogie celtique.

Synopsis :

Je m’appelle Bellovèse, fils de Sacrovèse, fils de Belinos. Pendant la Guerre des Sangliers, mon oncle Ambigat a tué mon père. Entre beaux-frères, ce sont des choses qui arrivent. Surtout quand il s’agit de rois de tribus rivales… Ma mère, mon frère et moi, nous avons été exilés au fond du royaume biturige. Parce que nous étions de son sang, parce qu’il n’est guère glorieux de tuer des enfants, Ambigat nous a épargnés.
Là-dessus, le temps a suivi son cours. Nous avons grandi. Alors mon oncle s’est souvenu de nous. Il a voulu régler ce vieux problème : mon frère et moi, il nous a envoyés guerroyer contre les Ambrones. Il misait sur notre témérité et notre inexpérience, ainsi que sur la vaillance des Ambrones. Il avait raison : dès le début des combats, nous nous sommes jetés au milieu du péril. Comme prévu, je suis tombé dans un fourré de lances. Mais il est arrivé un accident. Je ne suis pas mort.

Critique :

                JE SUIS LE CORRUPTEUR ! Cherchant à assouvir ma soif de Jaworski, je suis parvenu à emprunter l’épreuve non-corrigée de la nouvelle série de mon auteur français favori malgré le temps qui me manque actuellement. Et j’ai bien fais. Mais si j’ai adoré Gagner la Guerre, et mon collègue Eäron Valil lui aussi, j’ai trouvé Même pas Mort bien plus maitrisé. Exit les erreurs d’un premier roman qui malgré son excellence parmi son firmament contenait quelques longueurs. En parlant de longueur, celle de cette première « branche » est assez courte, ce qui ne laisse la place au final qu’à une introduction, mais quelle introduction, vraiment brillante !

                La très grande force de Jaworski à mon sens, c’est qu’il est un conteur merveilleux. A la lecture, j’ai pensé à Patrick Rothfuss. Ce n’est certes pas du tout les mêmes registres de style, mais c’est au final le même sentiment, je m’explique. Je caractériserais le style de Patrick Rothfuss de particulièrement épuré, très agréable à la lecture, et bien plus accessible que la plume ciselée de Jean-Philippe Jaworski qui fait parler le métier de prof de français, avec un niveau de langue bien plus élevé. Néanmoins, les deux parviennent à adopter cette narration de conteurs, qui parvient à mêler le réel « fictif » (que ce soit à base historique pour l’un ou complètement imaginaire pour l’autre) à la mythologie (idem précédente parenthèse). Le télescopage entre récit réaliste et récit imaginaire est parfait, et c’est la base de cette réussite.

                Restons dans la comparaison, mais cette fois-ci de sa précédente œuvre, Gagner la Guerre. Le métier rentre rapidement chez Jaworski, les longueurs ont été éliminées tout en conservant les qualités d’écriture donc, mais aussi en conservant aussi cet intérêt premier pour une Histoire avec un grand H. Vous connaissez mon horreur pour les choses bien écrites mais vides de fond. Et bien là, on a les deux. Certes, comme je l’ai déjà précisé, il s’agit d’un premier volume assez introductif qui peut paraître peut-être assez lent, et pourtant, jamais on ne s’ennuie grâce à la richesse du monde entremis par l’intermédiaire de la richesse de l’a plume de l’auteur. Chaque mot donne du sens à cet univers sur fond historique. Chaque personnage est particulier. Et si chaque moment ne se vaut pas, c’est parce que par moment, on touche quelque chose de grand dans cette fresque. Quoi donc ? On ne le sait pas encore, mais le suspense est à son comble malgré l’approche choisie, celle où l’on connait déjà plus ou moins la fin avec le récit de jeunesse de Bellovèse, notre héros, alors que celui-ci, on le devine, est d’un âge bien plus avancé désormais.

                Parlons des personnages, car il s’agissait aussi d’un des grands points forts de Gagner la Guerre, avec un Don Benvenuto manichéen à souhait, plein de gouaille et extrêmement attachant. Le registre est cette fois-ci différent avec Bellovèse. Au lieu d’un assassin des bas-fonds, on a de retranscrit dans ce texte un parfum de grandeur par l’intermédiaire de ces récits de guerres, et donc aussi par celui de Bellovèse, ainsi que quelques autres personnages. Derrière Bellovèse, on a un patchwork de personnalités extrêmement bien rendu et intéressant.

                Enfin, je conclurais sur la toile de fond de ce nouvel univers de l’auteur, ancré dans une période et à un peuple finalement peu abordés. Les recherches faites dessus semblent importantes, et surtout plus proche d’une certaine réalité historique que ce que j’ai déjà pu lire sur l’époque. Mais j’ai surtout pu apprécier que l’on parle de peuples celtes sans parler de romains, un peu loin des clichés, ce qui permet de casser ce côté « barbare » des gaulois avec cette histoire centrée sur eux. Malgré cette base très historique, bien plus que Gagner la Guerre puisqu’il s’agit d’ici d’inspiration directe, et non indirecte, n’oublions pas que l’aspect fantasy est justement bien plus présent ici que dans le premier roman de Jean-Philippe Jaworski. Et si j’apprécie beaucoup cette fantasy pauvre en magie, plus que le contraire probablement, elle est ici très bien rendue. La magie n’est pas ordinaire, certes, mais elle n’est pas dissociée de la réalité créée par l’auteur. Elle est présente, c’est tout, et rien de plus normal.

                Un premier opus introductif, meilleur sur la forme que Gagner la Guerre, pas encore sur le fond, mais qui promet de grandes choses pour la suite que l’on attend impatiemment.

Note : 9/10
LA plume française dans le genre de la fantasy. Un conteur et un style hors-pair à dévorer.

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