Titre : Les Seigneurs de Bohen
Auteur : Estelle Faye
Éditeur : Critic
Auteur : Estelle Faye
Éditeur : Critic
Parution : mars 2017
Illustration : Marc Simonetti
Illustration : Marc Simonetti
612 pages
25 euros
Synopsis :
« Je m’appelle Ioulia La Perdrix.
Mon récit commence il y a près de cent ans, à l’époque où Iaroslav le Juste
siégeait sur le trône de Bohen. Sur les hauteurs des monts des Sicambres, par
une glaciale nuit d’hiver, une abbaye brûlait… »
Je vais vous raconter comment l’Empire est mort.
L’Empire de Bohen, le plus
puissant jamais connu, qui tirait sa richesse du lirium, ce métal aux reflets
d’étoile, que les nomades de ma steppe appellent le sang blanc du monde. Un
Empire fort de dix siècles d’existence, qui dans son aveuglement se croyait
éternel.
J’évoquerai pour vous les héros
qui provoquèrent sa chute. Vous ne trouverez parmi eux ni grands seigneurs, ni
sages conseillers, ni splendides princesses, ni nobles chevaliers… Non, je vais
vous narrer les hauts faits de Sainte-Étoile, l’escrimeur errant au passé
trouble, persuadé de porter un monstre dans son crâne. De Maëve la morguenne,
la sorcière des ports des Havres, qui voulait libérer les océans. De Wens, le
clerc de notaire, condamné à l’enfer des mines et qui dans les ténèbres
découvrit une nouvelle voie… Et de tant d’autres encore, de ceux dont le monde
n’attendait rien, mais qui malgré cela y laissèrent leur empreinte.
Et le vent emportera mes mots sur
la steppe. Le vent, au-delà, les murmurera dans Bohen. Avec un peu de chance,
le monde se souviendra.
Critique :
Fait extraordinaire, je vais avec la présente chronique doubler mon
activité de blogueur par rapport à l'an dernier. Pour me sortir de cette
léthargie, il me fallait un roman extraordinaire. (Conclusion : le roman que je
vous présente en ce moment est ce fameux roman.) J'ai déjà eu l'occasion de
vous le teaser dans ma précédente chronique (je cite : "en mars, je
frissonne du coup de tonnerre qui arrive"). Il s'agit du dernier né de
l'imagination d'Estelle Faye : Les
Seigneurs de Bohen.
Je pense sincèrement qu'Estelle Faye nous livre ici un
texte qui deviendra un "classique" de la fantasy française tant j'ai
été impressionné. J'y ai vu beaucoup, vraiment beaucoup de bonnes choses. D’une
part une plume, toujours aussi rafraichissante de par son style, et de par son
ton. D’autre part des personnages, aussi divers et variés qu’attachants. Enfin,
une histoire, classique et pourtant surprenante. Dans Les Seigneurs de Bohen, je vois une sorte de synthèse de Joe
Abercrombie et ses univers sombres traversés par des personnages
charismatiques, de Jean-Philippe Jaworski pour la richesse de l’écriture et la
qualité du style, ainsi que de Loïs MacMaster Bujold pour l’humanité des
personnages.
Détaillons un peu en revenant à un point auquel je
suis en général particulièrement sensible : les personnages. Dans le cas
présent, il s’agit indéniablement d’un des immenses points forts du récit. Les
personnages sont tous, sans exception, intéressants. Alliés à la subtilité de
l’écriture et de la pensée d’Estelle Faye, cela donne des personnages profonds
et puissants, parfois en peu de mots, parfois avec des développements plus
poussés quand cela concerne les principaux héros, à savoir Sainte-Étoile le
guerrier, Maëve la sorcière et Wens le clerc de notaire. J’ai trouvé par
ailleurs le dosage du nombre de personnages vraiment nickel. Le patchwork est
suffisamment étoffé pour apporter une diversité de points de vue et une
complexité scénaristique, sans pour autant être constamment abreuvé de nouveaux
personnages qui rendraient le récit trop confus.
Par le biais de ces personnages, nous allons naviguer
d’un point à un autre du récit de la chute de l’Empire de Bohen. Plus encore,
nous allons, tel un navire en mer, traverser un univers foisonnant qui,
toujours, saura nous apporter des surprises. On vit les rebondissements de nos
protagonistes. Vraiment, Estelle Faye a su créer un monde riche et passionnant,
en parvenant à maintenir une cohérence générale qui pousse à la curiosité. Si à
l’avenir l’idée lui venait d’écrire de nouveau dans cet univers, sans nul doute
aura-t-elle de la matière sous la main tant cela m’a paru vaste.
J’en reviens à la comparaison avec Abercrombie, qui me
semble être la référence présentant le plus de proximité avec Les Seigneurs de Bohen, dans cet
exercice des correspondances toujours un peu périlleux. Une noirceur certaine
rapproche ces deux univers, mais c’est aussi – j’y reviens très souviens – la
présence de personnages charismatiques et abimés par les événements qui donne
le sel de l‘histoire. Néanmoins, et c’est là où je fais un rapprochement avec
Loïs MacMaster Bujold et de son cycle de Chalion, je vois une approche un peu
inverse dans l’écriture. Abercrombie a tendance à présenter des personnages
qui, de base, sont présentés comme des anti-héros. Estelle Faye adopte une
approche plus subtile, plus humaine, où ses héros ne sont pas lisses, portent
des tourments forts, et pourtant sont difficilement classables dans la
catégorie bien badass des anti-héros.
Est-ce que pour autant ça leur enlève de la saveur ? Entre Glotka
(Abercrombie) et Cazaril (MacMaster Bujold), je crois que je n’ai pas de
préférence J
Je dérive en divers atermoiements dans ma chronique,
donc je vais tenter de conclure afin de vous donner envie de vous précipiter
sur cette lecture, car c’est un livre qui mérite d’être lu aussi vite que
possible. J’ai été bluffé. Je connaissais le talent de l’auteure. Seulement,
cela n’offre pas la garantie d’une telle lecture. Il y a une maîtrise du rythme
qui fait que l’on ne s’ennuie jamais lors de la lecture de ce pavé de près de
600 pages. On se trouve emporté par la force créatrice d’Estelle Faye, par son
style, par ses personnages, par son univers, par son histoire, par un tout. Peut-être y a-t-il
des points faibles dans ce texte, mais je ne les ai pas vu tant il y a de
points forts. Je ralentissais ma lecture pour profiter de tous les détails, pour
bien m’imprégner comme j’avais pu le faire en lisant Gagner la Guerre de Jean-Philippe Jaworski. On ressent une auteure
qui se lâche et nous offre un récit plein de panache (un peu sanglant par
ailleurs, le panache :p). Foncez !
Ok, je fonce, merci. ;)
RépondreSupprimerÇa fait plaisir d'être écouté ^^
SupprimerC'est dommage que ce genre de récit ne m'attire plus du tout sinon je me serais jetée dessus (mais je le garde en tête pour un jour où j'aurais envie d'un roman de fantasy bien prenant). C'est bien une histoire en un seul volume ?
RépondreSupprimerYep, en un seul volume. Après, j'ai ouï-dire qu'Estelle Faye reviendra avec plaisir à cet univers :)
SupprimerJ'espère que tu retrouveras la flamme pour le lire en tout cas ^^
Lu. Et je suis en tout point (enfin, sauf les comparaisons que je ne peux pas vraiment faire) d'accord avec toi. C'est vraiment excellent. Comme tu le dis, il y a une maitrise incroyable et une flopée de personnages tous (tous !) "sympathiques", c'est bluffant.
RépondreSupprimerMais en même temps, Estelle Faye a-t-elle déjà écrit un mauvais livre ? =P
Ahah, je n'ai rien lu de mauvais chez Estelle, c'est sûr. Mais, parce qu'il y a un mais, il n'en reste pas moins que j'ai adoré Les Seigneurs de Bohen, plus encore que le reste de sa production :)
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